La fonte des rêves.
Bonjour,
En ce moment, de plus en plus, je plonge dans mes rêves. Je n'arrive plus à encaisser la réalité. Elle me parait trop prosaïque. J'ai l'impression qu'elle se ramène, en dernier ressort, à des archétypes auxquels quoi que nous fassions, nous ne pouvons pas échapper. On s'agite, mais quoi qu'on fasse, on vieillit, on y laisse la santé, et à terme, on y laissera la peau.
En gros, l'humanité se pourrit la vie, s'emboucane. A l'échelle des nations, plongées dans leur compétition absurde. A l'échelle des entreprises, des individus, et même au sein de l'individu tout seul. Contradictions, incohérences, difficultés d'adaptation... Je crois qu'on se fait souffrir, les uns les autres, et que personne n'y peut rien.
Je me dis que souvent, il y a le décor et l'envers du décor. Ce décor est cultivé avec soin par le système, qui a l'art de la présentation bien faite ; regardez comme c'est bien fichu, dans les boutiques à la mode, dans les magazines, dans le petit ou le grand écran, dans la politique, dans tout ce que les humains produisent quand ils veulent vendre quelque chose, brefn quand il y a des enjeux, du pouvoir. Pouvoir et pognon, on n'en sort pas. Quand du pognon est en jeu, on sait bien nous bluffer, nous vendre du merveilleux, du rêve ! Et puis après, il y a la réalité : une fois que le zinzin est acheté, démerdez-vous avec le S.A.V ! Une fois que les lumières se rallument, on a du mal à s’y adapter. Une fois que Tartempion est élu, il oublie ses promesses.
Je ne sais pas, c'est une impression que j'ai. J'éprouve du mal à en parler. Il me semble que lorsque nous nous laissons aller à enjoliver le choses et y croire, nous sommes victimes de nos propres illusions, entretenues à dessein par le système. En fait, et quoi qu’on en dise, tout se joue à un niveau très terre à terre, ce qui fait que les gens comme moi, qui manifestent une nette propension à rêver, se heurtent constamment à la réalité.
J'ai le sentiment qu'autour de moi, les "adultes" ont intégré une notion d'échec, à travers des attitudes qui montrent qu'ils se sont résignés. Non, ceci n'est pas possible. Non, cela ne marchera pas. Les gens diront qu'ils ne sont pas d'accord. On n'aura pas les crédits, les autorisations. Techniquement, ça n'est pas réalisable, ou alors ça reviendrait très cher... etc. Ou alors, c'est moi qui ai tendance à vouloir des choses qui ne sont pas réalistes ?
C'est vrai que le commun, le prosaïque, le banal, le quotidien, m'ennuient. Je le vois à travers un peu tout. En musique, je côtoie des gens pour qui le fin du fin est de reprendre un tube de Toto ou de Tina Turner. Alors que moi, ça m'ennuie. Je délire sur King Crimson, sur Magma, mais à quoi ça sert, puisque ça ne fait réagir personne ou si peu de monde ? Et pour des réactions qui restent, il faut le dire, très timides, très limitées. En arts plastiques, idem. Je me sens très isolé. Quand à l'écriture, je ne sais pas si je me "sens" encore de pondre quoi que ce soit.
Certes je suis passé à travers les épreuves injustes qui m'étaient tombées dessus. Et que j'avais provoquées, indirectement, en laissant pourrir certaines situations. OK, j'en sors entier, mais dans quel état ? Il me semble que je suis trop vieux pour m'attaquer à quoi que ce soit de l'ordre de ce qui me faisait rêver.
Déjà, dans les années 80, mes rêves étaient irréalistes car j'étais attiré par des choses non-commerciales, absolument pas rentables, attiré par des voies marginales et hors circuit. Mais à fortiori maintenant, car d'une j'ai vieilli, je n'ai plus la pêche comme avant. De deux, notre monde est encore plus gouverné par la pub, le commerce à outrance, le nivellement des esprits, la surenchère liée à la compétition des chaînes de télévision... Bref, dans les années 80 le monde était déjà très con, mais là, on bat les records. La seule chose qui a progressé de façon intéressante, c'est la sensibilité à l'environnement, les prises de conscience à ce niveau. Mais sur le plan culturel, pour le reste, ouff.... On est de plus en plus dans frime, strass, paillettes et star academy. C’est une société schizée, coupée en deux : d’un côté les nantis, de plus en plus idiots, gâtés, entourés de gadgets, gavés de muzak insipide, de pub idiote, de séries télé idiotes, de films idiots, réalisés impeccablement, avec de super effets spéciaux mais dont les histoires sont navrantes, bourrées de clichés, de lieux communs. De l’autre, ceux qui n’ont rien, qui essaient de survivre à grand-peine, qui n’ont pas le minimum vital.
Bref, quand je discute avec des gens, je me heurte à leur résignation, au fait que de nos jours, la télé brasse des conneries et qu'on y peut rien, que maintenant les jeunes ne respectent plus rien et que c'est comme ça, que la violence est partout mais faut s'y faire, qu'il ne passe plus que de la merde à la radio mais tant pis, que c'est la guerre à droite, la misère à gauche, que partout règne l'abrutissement des masses mais on ne va pas changer le monde, que... Est-ce que je sais, encore ?
Il semble que je ne m'intéresse qu'à des choses qui, inévitablement, m'amènent sur des voies solitaires et périlleuses. Chaque fois que je me lance dans un projet, à terme je me retrouve confronté à l'incompréhension des autres, le fait que je m'aventure hors des formats encouragés, admis, tolérés par le système. Donc, fatalement seul. Ou alors, je bute sur des difficultés techniques auxquelles je ne trouve pas de réponse, par manque de moyens. Je ne désire que des choses qui apparemment me résistent. Pourquoi n’ai-je pas envie, comme tout le monde, de me vautrer devant la télé et ne pas chercher à comprendre ? Quel est donc ce démon qui me pousse à vouloir réaliser des choses ? Quel est donc ce trouble qui me pousse hors de la conformité douillette dont se contentent les autres ? Est-ce que c’est moi qui ai du mal à accepter, à faire les deuils nécessaires ? Sont-ils trop résignés ou est-ce moi qui suis trop agité, trop victime de mes propres illusions ? Pourquoi je ne tombe pas en extase devant le dernier tube de Diam's ? Pourquoi je ne braille pas, une bière à la main, devant la coupe de monde de foot ? Ce serait tellement plus simple pour moi...
Je n’arrive même pas à le dire, voyez.
Il me semble que la plupart des gens sont emboucanés. Par leur boulot, leurs enfants. Leurs voisins, leur famille. Ou par eux-mêmes.
Moi je suis hanté par mon envie de créer, et je ne sais même pas pourquoi. Il me semble que lorsque la neige fond, il ne reste que de la gadoue plus ou moins sale. Idem les rêves. Et quand fondent les rêves, qu’est-ce qu’il en reste ? Quand on regarde objectivement les choses, quand on ne se laisse pas piéger par les jolis décors, les modes, les apparences, les gadgets que le système agite sous notre nez, on voit derrière tout ça la même chose : pognon, pognon, logique du pognon, encore, partout, toujours.
Je ne sais pas ce qui m’arrive. En ce moment, je voudrais m’enfermer, pendant des jours, et trouver un moyen de sculpter, de réaliser en vrai, en trois dimensions, les choses qui hantent, qui encombrent mon inconscient. Va savoir pourquoi. Il me semble que c'est la seule chose que j'aie à faire. Créer. Mettre au monde des choses dont je suis porteur, parce que sinon, je ne saurai pas quoi en faire et je vais en étouffer.
Bref, je vous ai fait perdre cinq minutes et je ne sais même pas pour exprimer quoi.
Allez, sans rancune.
Ubik.
En ce moment, de plus en plus, je plonge dans mes rêves. Je n'arrive plus à encaisser la réalité. Elle me parait trop prosaïque. J'ai l'impression qu'elle se ramène, en dernier ressort, à des archétypes auxquels quoi que nous fassions, nous ne pouvons pas échapper. On s'agite, mais quoi qu'on fasse, on vieillit, on y laisse la santé, et à terme, on y laissera la peau.
En gros, l'humanité se pourrit la vie, s'emboucane. A l'échelle des nations, plongées dans leur compétition absurde. A l'échelle des entreprises, des individus, et même au sein de l'individu tout seul. Contradictions, incohérences, difficultés d'adaptation... Je crois qu'on se fait souffrir, les uns les autres, et que personne n'y peut rien.
Je me dis que souvent, il y a le décor et l'envers du décor. Ce décor est cultivé avec soin par le système, qui a l'art de la présentation bien faite ; regardez comme c'est bien fichu, dans les boutiques à la mode, dans les magazines, dans le petit ou le grand écran, dans la politique, dans tout ce que les humains produisent quand ils veulent vendre quelque chose, brefn quand il y a des enjeux, du pouvoir. Pouvoir et pognon, on n'en sort pas. Quand du pognon est en jeu, on sait bien nous bluffer, nous vendre du merveilleux, du rêve ! Et puis après, il y a la réalité : une fois que le zinzin est acheté, démerdez-vous avec le S.A.V ! Une fois que les lumières se rallument, on a du mal à s’y adapter. Une fois que Tartempion est élu, il oublie ses promesses.
Je ne sais pas, c'est une impression que j'ai. J'éprouve du mal à en parler. Il me semble que lorsque nous nous laissons aller à enjoliver le choses et y croire, nous sommes victimes de nos propres illusions, entretenues à dessein par le système. En fait, et quoi qu’on en dise, tout se joue à un niveau très terre à terre, ce qui fait que les gens comme moi, qui manifestent une nette propension à rêver, se heurtent constamment à la réalité.
J'ai le sentiment qu'autour de moi, les "adultes" ont intégré une notion d'échec, à travers des attitudes qui montrent qu'ils se sont résignés. Non, ceci n'est pas possible. Non, cela ne marchera pas. Les gens diront qu'ils ne sont pas d'accord. On n'aura pas les crédits, les autorisations. Techniquement, ça n'est pas réalisable, ou alors ça reviendrait très cher... etc. Ou alors, c'est moi qui ai tendance à vouloir des choses qui ne sont pas réalistes ?
C'est vrai que le commun, le prosaïque, le banal, le quotidien, m'ennuient. Je le vois à travers un peu tout. En musique, je côtoie des gens pour qui le fin du fin est de reprendre un tube de Toto ou de Tina Turner. Alors que moi, ça m'ennuie. Je délire sur King Crimson, sur Magma, mais à quoi ça sert, puisque ça ne fait réagir personne ou si peu de monde ? Et pour des réactions qui restent, il faut le dire, très timides, très limitées. En arts plastiques, idem. Je me sens très isolé. Quand à l'écriture, je ne sais pas si je me "sens" encore de pondre quoi que ce soit.
Certes je suis passé à travers les épreuves injustes qui m'étaient tombées dessus. Et que j'avais provoquées, indirectement, en laissant pourrir certaines situations. OK, j'en sors entier, mais dans quel état ? Il me semble que je suis trop vieux pour m'attaquer à quoi que ce soit de l'ordre de ce qui me faisait rêver.
Déjà, dans les années 80, mes rêves étaient irréalistes car j'étais attiré par des choses non-commerciales, absolument pas rentables, attiré par des voies marginales et hors circuit. Mais à fortiori maintenant, car d'une j'ai vieilli, je n'ai plus la pêche comme avant. De deux, notre monde est encore plus gouverné par la pub, le commerce à outrance, le nivellement des esprits, la surenchère liée à la compétition des chaînes de télévision... Bref, dans les années 80 le monde était déjà très con, mais là, on bat les records. La seule chose qui a progressé de façon intéressante, c'est la sensibilité à l'environnement, les prises de conscience à ce niveau. Mais sur le plan culturel, pour le reste, ouff.... On est de plus en plus dans frime, strass, paillettes et star academy. C’est une société schizée, coupée en deux : d’un côté les nantis, de plus en plus idiots, gâtés, entourés de gadgets, gavés de muzak insipide, de pub idiote, de séries télé idiotes, de films idiots, réalisés impeccablement, avec de super effets spéciaux mais dont les histoires sont navrantes, bourrées de clichés, de lieux communs. De l’autre, ceux qui n’ont rien, qui essaient de survivre à grand-peine, qui n’ont pas le minimum vital.
Bref, quand je discute avec des gens, je me heurte à leur résignation, au fait que de nos jours, la télé brasse des conneries et qu'on y peut rien, que maintenant les jeunes ne respectent plus rien et que c'est comme ça, que la violence est partout mais faut s'y faire, qu'il ne passe plus que de la merde à la radio mais tant pis, que c'est la guerre à droite, la misère à gauche, que partout règne l'abrutissement des masses mais on ne va pas changer le monde, que... Est-ce que je sais, encore ?
Il semble que je ne m'intéresse qu'à des choses qui, inévitablement, m'amènent sur des voies solitaires et périlleuses. Chaque fois que je me lance dans un projet, à terme je me retrouve confronté à l'incompréhension des autres, le fait que je m'aventure hors des formats encouragés, admis, tolérés par le système. Donc, fatalement seul. Ou alors, je bute sur des difficultés techniques auxquelles je ne trouve pas de réponse, par manque de moyens. Je ne désire que des choses qui apparemment me résistent. Pourquoi n’ai-je pas envie, comme tout le monde, de me vautrer devant la télé et ne pas chercher à comprendre ? Quel est donc ce démon qui me pousse à vouloir réaliser des choses ? Quel est donc ce trouble qui me pousse hors de la conformité douillette dont se contentent les autres ? Est-ce que c’est moi qui ai du mal à accepter, à faire les deuils nécessaires ? Sont-ils trop résignés ou est-ce moi qui suis trop agité, trop victime de mes propres illusions ? Pourquoi je ne tombe pas en extase devant le dernier tube de Diam's ? Pourquoi je ne braille pas, une bière à la main, devant la coupe de monde de foot ? Ce serait tellement plus simple pour moi...
Je n’arrive même pas à le dire, voyez.
Il me semble que la plupart des gens sont emboucanés. Par leur boulot, leurs enfants. Leurs voisins, leur famille. Ou par eux-mêmes.
Moi je suis hanté par mon envie de créer, et je ne sais même pas pourquoi. Il me semble que lorsque la neige fond, il ne reste que de la gadoue plus ou moins sale. Idem les rêves. Et quand fondent les rêves, qu’est-ce qu’il en reste ? Quand on regarde objectivement les choses, quand on ne se laisse pas piéger par les jolis décors, les modes, les apparences, les gadgets que le système agite sous notre nez, on voit derrière tout ça la même chose : pognon, pognon, logique du pognon, encore, partout, toujours.
Je ne sais pas ce qui m’arrive. En ce moment, je voudrais m’enfermer, pendant des jours, et trouver un moyen de sculpter, de réaliser en vrai, en trois dimensions, les choses qui hantent, qui encombrent mon inconscient. Va savoir pourquoi. Il me semble que c'est la seule chose que j'aie à faire. Créer. Mettre au monde des choses dont je suis porteur, parce que sinon, je ne saurai pas quoi en faire et je vais en étouffer.
Bref, je vous ai fait perdre cinq minutes et je ne sais même pas pour exprimer quoi.
Allez, sans rancune.
Ubik.
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